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Presumption

Actu Interview Publié le 28/05/2018

Fort de plusieurs EP et de quelques dates à travers l’Europe, Presumption fête ses dix ans d'existence en 2017. Rencontre avec Anaël, batteur et fondateur de ce groupe désormais incontournable dans la scène metal sarthoise.

Comment s’est formé le groupe Presumption ?

Mômes, on avait un groupe qui s’appelait Asylum, c’était “metal”. On faisait quelques dates et même une petite tournée dans l’ouest organisée par une MJC du coin. Mon frère Moomoot avait 15 ans, j’en avais 17 : c’était une belle première expérience. Seul, j’ai eu quelques projets dans différents styles (chanson française, reggae, jazz…) mais ça a toujours été un ou deux concerts. Et puis, avec Moomoot, on voulait rejouer ensemble, donc on a monté Presumption. 

On va fêter nos dix ans cette année. Presumption a démarré en 2007 avec MooMoot au chant, puis également à la basse, suite au départ de notre bassiste en 2010. On faisait pas mal de répètes, quelques concerts, mais on a rien enregistré : on s’éclatait sans prétention. La première démo est sortie en 2012, année où Marvin est arrivé dans le groupe à la guitare et où le line-up s’est stabilisé. On a alors enchaîné pas mal de concerts, un nouvel EP en 2014 “From Judgment to the Grave” un peu plus pro, enregistré dans un vrai studio du côté de Caen, le Swan Sound Studio. Des belles chroniques ont suivi et davantage de concerts. Depuis 2014, on tourne dès qu’on peut : on a joué en Espagne, en Irlande et aux quatre coins de la France. Presumption a partagé de belles scènes avec Mars Red Sky et Headcharger par exemple... 

Notre dernier EP “Ancestral Rites” a été enregistré chez Syncope Management l’année dernière. On essaye maintenant de passer à la vitesse supérieure. À l’étranger, on a été super bien accueillis et le public était présent - sauf sur une date en Espagne où on s’est retrouvés devant sept personnes dans une énorme salle… En Irlande, c’était un peu différent, plus mitigé, avec des gens un peu plus froids, pas très réactifs pendant le concert, super sympas après le show… Même au stand merch, ils achètent des trucs !
Depuis quelques mois, on a tous quelques projets en parallèle, toujours metal. La machine est lancée, on répète beaucoup moins. Ça tourne et on a envie de faire autre chose à côté. Mais  on oublie pas pour autant Presumption, qui reste notre projet principal. 

Comment se passe les phases de compositions ? Que pouvez-vous nous dire sur ce nouvel opus ? 

Pour la composition, c’est totalement collectif. Même si ça arrive que les guitaristes apportent un riff ou deux et qu’on brode autour. On discute beaucoup pendant les séances de composition, il y a une interaction totale. Mais bien souvent, ça part de “jams”, en totale improvisation. On enregistre nos répètes aussi et on réécoute pour finalement garder certains trucs. On ne compose pas pour le studio, tout est posé bien avant. Pour la grande majorité des morceaux, on préfère roder les morceaux en live, comme ça se faisait dans les années 70. On peut mesurer la réaction du public et entendre les critiques. Ensuite seulement, on enregistre. 
On a longtemps réfléchi à donné une ligne directrice à nouvel opus, puis on a laissé tomber. Notre musique mélange trop d’influences différentes ! Il y a du “doom” (le doom metal se distingue par des tempos plus lents, des accordages de guitares plus graves et des sons plus lourds et plus épais, NDLR) mais aussi ce côté plus frais et groovy du “stoner” et du son 70’s. On écoute tous chacun un peu de tout et on apporte notre pierre à l’édifice. On est des gros fans de Black Sabbath évidemment, mais aussi de Cathedraal, Pentagram, Saint Victus… 

Pour les textes, c’est le plus souvent Moomoot qui s’en occupe. Grossièrement, dans les trois premiers EP, on parlait de déviance humaine au sens large : les tueurs en série et des choses comme ça. Sur l’album, on a un morceau qui parle de la fin du monde et d’une guerre atomique, certainement le morceau le plus politisé de Presumption. Il y a aussi un poème qu’un ami a écrit et qu’on a mis en musique, titre inspiré d’une nouvelle d’Edgar Allan Poe… Un peu de tout quoi ! (rires)
On va enregistrer l’album au studio de La Forge qui est tenu par Gorgor, le batteur de Phazm. On le connaît bien, il fait vraiment du bon travail et a su développer sa propre marque de fabrique. C’est un super studio, accessible financièrement et humainement. 

Et en concert, ça donne quoi Presumption ?

En live, on a travaillé tout un jeu scénique. Le chanteur est en robe de juge pour symboliser une forme d’autorité. Presumption, c’est une référence à la présomption d'innocence : on reste dans le thème évidemment (rires). Quand on fait de plus grandes scènes, on installe  un pupitre derrière laquelle il rend ses jugements par le biais de son maillet. Quand on peut, on fait quelque chose de théâtral. Par exemple, pour “Syncope fait de la résistance” en octobre dernier, il y avait un morceau qu’on jouait depuis des années sur “La Meffraye”, la sorcière de Barbe-bleue. Une amie était alors grimée en sorcière et on l’a assassiné sur scène. Comme pour enterrer le morceau et ne plus le jouer. On essaye de rajouter des petites élements de temps en temps. C’est un peu propre au metal d’avoir ce genre de mise en scène. Car le metal, c’est pas QUE de la musique, c’est aussi une culture, un imaginaire avec toute une imagerie derrière. Plutôt que de passer de la vidéo derrière, avec des kaléidoscope ou je ne sais quoi, on est aussi acteurs, en plus d’être musiciens. Comme Ghost, Rammstein et leur jeu scénique qui raconte toute une histoire… ou même Iron Maiden en plus vieux. On en est pas encore là, on se cantonne au pupitre et à la robe de juge… Mais un jour viendra ! Le metal c’est quelque chose qui se vit, qui se partage, c’est une énergie, une communion, un sabbat qui s’opère entre le public et les groupes. 

Et la Wizard Asso ? 

On a créé la Wizard Asso il y a un peu plus de trois ans maintenant, en janvier 2014. À la base, on a monté l’association pour se structurer avec le groupe. En parallèle, on a fait le constat qu’on manquait cruellement de concerts “metal” sur Le Mans. Alors pourquoi pas utiliser l’asso pour organiser quelques dates ? On avait lancé sur Facebook l’idée d’une réunion publique, on pensait avoir 5-6 personnes, mais on était 25-30 personnes autour de la table. Depuis, on a organisé 20 concerts, à la Péniche Excelsior, à Jean-Carmet, aux Saulnières mais aussi dans des bars concerts comme Les Docks, Le Circuit de la bière, Le Lézard et même le PCV à l’époque. Bref, un peu partout où on accepte de programmer du metal ! 
On a fait jouer Mars Red Sky, dernièrement Regarde Les Hommes Tomber. Le dernier concert c’était avec Crisix, un groupe de thrash espagnol qui tourne pas mal. On privilégie aussi des petits groupes. Il y a pas mal de musiciens dans l’asso, et on constate tous que c’est un peu galère de trouver des salles... Du coup, on programme des groupes qui ont une petite renommée et qui ont besoin de jouer, avec des locaux en support… même si c’est vrai qu’on a un peu fait le tour de la question à ce niveau-là (rires).  

Comment ça se passe pour les scènes ? 

Pour trouver des dates avec Presumption, c’est assez ambigu. D’un côté, tu as un réseau metal qui existe, avec beaucoup d’entraide. C’est assez facile et on arrive à faire pas mal d’échanges de dates avec d’autres groupes. Mais, même si le metal se démocratise, certains établissements refusent toujours de programmer. Il y a toujours des a priori du genre ”Non, moi j’organise pas de metal à cause du bruit”. D’un autre côté, je trouve pas qu’il y ait d’énormes différences entre la scène metal et les autres genres. Il y a sûrement plus un public de passionnés, avec qui tu peux discuter un peu plus en profondeur sur le style. C’est une grande famille. On a des atomes crochus finalement avec le public parce qu’on est les “mêmes gens”. Plus proche. La plupart du temps, une bonne partie du public est musicien. 

Peut on espérer une démocratisation du metal en France, comme on le voit par exemple dans les pays nordiques (Suède ou Norvège) ?

J’ai l’impression que je vais faire mon “vieux con”... C’est ce que j’espère depuis des années, mais j’ai pas l’impression que ça avance pour autant. On avait une locomotive avec Gojira mais ils se sont finalement expatriés... Gorod aussi : ici, ils sont presques inconnus mais ils tournent avec des groupes très réputés à l’étranger comme Morbid Angel… Tu vois bien que les groupes ont cette nécessité pour fonctionner. Au bout d’un moment, tu es limité en France. Si tu veux vraiment percer, tu es obligé d’aller en Allemagne, aux USA ou en Scandinavie… En France, il n’y a pas encore cette culture metal. Après, avec un événement comme le Hellfest, le metal commence à s’ouvrir au grand public. Chacun en pense ce qu’il veut, mais c’est un fait incontestable. D’ailleurs, si jamais les organisateurs nous le proposent, on ira jouer avec plaisir au Hellfest ! 

Ce qui est compliqué avec le metal, c’est vraiment une grande famille avec plein d’états d'esprit différents. Il y a en commun une philosophie de vie, un esprit de liberté, une envie de s’amuser. Tu peux parler de tout, de la musique la plus extrême possible, la plus mélodique possible. Après, dans le black metal, tu as des gens qui ont un côté, n’ayons pas peur des mots, “fascisant” qui colle pas forcément avec l’ “esprit metal”, mais ça touche une frange assez restreinte de ce genre. 

Quel est le programme pour cette fin 2017 ? 

On part en tournée juste après la sortie de l’album en octobre prochain pour le promouvoir. Une douzaines de dates à travers l’Europe : en France pour 4 dates, puis l’Espagne, l’Italie, la Suisse, l’Allemagne et la Belgique. On sera avec Mantras, un groupe de stoner psyché de Poitiers où on retrouve des membres de The Bottle Doom Lazy Band (groupe phare du doom français). Dans nos tournées, il ne se passe pas grand chose. On a jamais eu de soucis, on touche du bois pour le moment ! Évidemment, on va pas se coucher après le concert, même si on est crevés au bout de quatre jours (rires).
Sur une précédente tournée en Irlande, on avait un day-off où on en a profité pour aller tout en haut du Connemara. Il y avait un vent de fou furieux et on n’était pas sûrs d’arriver en haut, surtout que tout le monde nous avait déconseillé d’y monter. On y est allé et on a finalement ouvert notre Guiness en haut. C’était assez rock’n’roll ! 

Que peut-on vous souhaiter pour la suite ? 

Fêter nos cinquantes ans de carrière, ça serait cool ! (rires)
Plus sérieusement, à travers cet album, on espère toucher un plus large public, tourner encore un peu plus loin et le plus longtemps possible. 

Et puis, continuer la musique et enregistrer encore un maximum d’albums avec toutes nos idées qui foisonnent en répète !